Les harkis

Un de mes lecteurs m'a fait parvenir un message qui m'a profondément touché pour deux raisons. La première, c'est le sujet de ce message, et la deuxième, c'est que Hocine ait fait appel à moi, car j'ose croire que s'il l'a fait, c'est que quelque chose dans mes écrits lui a donné confiance, et qu'il a compris que si je suis un con, je suis plutôt un pauvre con, ou un brave con, qu'un sale con, ce qui, encore une fois, me touche beaucoup. Du coup, le moins que je puisse faire, c'est de vous transmettre son message. Toutefois, ne sachant pas s'il lui plairait que je révèle son identité complète, je ne vous donnerai que son prénom. 

Voici son message :
En 1975, 4 hommes cagoulés font irruption dans la mairie de Saint Laurent des Arbres, dans le Gard. 
En menaçant de tout faire sauter à la dynamite, après 24 heures de négociations, ils obtiennent la dissolution du camp de harkis proche du village.

A l'époque, depuis 13 ans, ce camp de Saint Maurice l'Ardoise, ceinturé de barbelés et miradors, accueille 1200 harkis. Discipline de fer, conditions d'hygiène minimales, violence et répression, 40 malades mentaux qui errent désœuvrés, isolement total de la société française, étaient le lot quotidien des pensionnaires de ce camp. 

Sur les 4 membres anonymes cagoulés de ce commando, un seul se décide à parler. 35 ans après, Hocine raconte comment il a risqué sa vie pour faire raser le camp de la honte.

Hocine raconte son histoire sur radio.alpes.net.Audio.France.Algérie.

Je suis flatté que Hocine m'ait envoyé ce message. Hélas, à part un commentaire pour crier mon indignation, je ne peux rien faire pour réparer le mal qui a été fait. Mais mon indignation, je la crie!!! Et, hélas, l'Etat français s'est souvent montré ingrat envers ceux qui l'ont servi, ceux qu'il a envoyés à la mort! Et pour remercier ces gens qui sont allés au feu avec un courage éblouissant, qui perdaient plusieurs milliers de morts en une seule journée, et qui remontaient à l'assaut le lendemain, il les fit fusiller pendant la grande guerre (14-18) juste parce qu'ils avaient râlé à cause de la soupe qui n'était pas bonne. Et avec les harkis, l'Etat français a abandonné ses enfants! Il a désarmé des milliers de harkis qu'il a ensuite laissés sans défense en Algérie, aux mains vengeresses de leurs ennemis! Quant aux autres, ceux qui furent embarqués vers la métropole, ils furent entassés dans des camps infâmes! Hocine explique que le camp dont il est question dans son message accueillait 1200 harkis. Etant données les conditions dans lesquelles ils y étaient retenus, je dirais qu'ils y étaient prisonniers. Et pendant ce temps, comme la France manquait de main-d'œuvre, elle accueillait des immigrés, dont certains avaient combattu dans le camp adverse. Ceux-là arrivaient sur le sol français où ils trouvaient un travail, ils étaient libres de circuler et de repartir à leur guise, pendant qu'on réservait aux harkis le sort que vous savez.

Je me demande toujours autant si Coluche avait raison quand il disait :"Il paraît qu'on est cernés par les cons. C'est vrai, mais on ne se rend pas compte à quel point." Et je me demande si on ne devrait pas se poser la même question pour les salauds.

Hocine, je te salue.

Régis Ducon Lajoie la Marée Monte