La rancoeur

A la suite de l'affaire Mohamed Merah, la chaîne de télévision Al Jazeera en anglais a diffusé un reportage sur ce que nous avons l'habitude d'appeler les jeunes des banlieues.

Ils ont été nombreux ceux qui, issus de l'immigration, sont venus tenir des propos accablants devant les caméras. Ils ont expliqué combien ils sont victimes d'injustices, de discriminations, du racisme. Ils ne peuvent quitter leur quartier sans sentir le mépris des Français. Après tous ces témoignages, en arrivant à la fin de l'émission, il y avait de quoi avoir l'impression que, avec tant de brimades, ces jeunes ne pouvaient finir que comme Mohamed Mérah.

Cela est mauvais pour l'image de la France, mais il n'y a rien à reprocher à cette chaîne de télévision qui a fait, à cette occasion, son travail correctement. Car ces jeunes qui se plaignent n'ont pas été inventés par Al Jazeera. Ils existent bel et bien.
Comme j'ai l'habitude de l'expliquer, j'aimerais qu'on reçoive les immigrés en France comme ils sont reçus en Suède, où on leur donne, dès leur arrivée, un logement décent, une allocation qui leur permet de vivre décemment et des cours gratuits pour leur enseigner la langue du pays. Et j'aimerais qu'on leur enseigne également nos principes moraux, nos règles de politesse, voire notre code des bonnes manières, car c'est ce qui permet d'atténuer les frictions qui se produisent dans la vie en société, à la condition de tous avoir les mêmes règles.

Et ils n'y a pas qu'à eux qu'il faudrait enseigner cela, car des gens qui ont des ancêtres français depuis Clovis sont d'une incorrection insupportable. C'est pourquoi, dans certains quartiers, nous voyons des gens de toutes origines se pourrir la vie les uns les autres, parce qu'ils n'ont aucune notion de ce qu'est la politesse, c'est à dire le respect des autres.
Et j'insiste sur le fait que cela est vrai pour des gens de toutes les origines possibles.
Et c'est vrai que lorsque ces gens mal élevés quittent leur coin, les gens moins mal élevés les regardent d'un mauvais oeil, quelle que soit leur origine. Mais si on est issu de l'immigration, il est facile de ne pas comprendre qu'on est mal vu parce qu'on est mal élevé, qu'on parle mal et qu'on se tient mal. Je ne prétends pas pour autant qu'il n'y a pas de racisme et d'injustice, mais il est évident que si on apprend à être aimable, on a plus de chance d'être aimé que si on ne l'est pas, quelles que soient nos origines.
Et puis, je conseillerai aux uns et autres de ne pas donner le bâton pour se faire battre. Quand des gens, ou leurs parents, ont traversé les mers au péril de leur vie, embarqués sur des caisses à savon, il n'y a pas besoin d'être raciste ou lepeniste pour demander comment il se fait, si les Français sont si détestables, que ces gens qui s'en plaignent tant, ne renient pas leur nationalité française, et ne se précipitent pas vers la frontière la plus proche pour rejoindre un pays où ils seraient mieux reçus. 
Avec ma double nationalité, j'ai, moi aussi, des origines étrangères, et je n'aimerais pas que l'impensable finisse par se produire. En effet, si la situation continuait à se dégrader, si la rancoeur conduisait à la haine, les lepenistes ou d'autres pourraient finir par arriver au pouvoir et, pour protéger la paix civile, ils seraient peut-être ravis de confisquer la nationalité française à la première, deuxième, et pourquoi pas à la troisième génération. Je serais alors privé de ce droit, moi qui, comme d'autres, n'ai rien fait pour cela.
Régis Ducon Lajoie la Marée Monte