Il était une fois.

Je vous ai déjà offert ce texte, mais comme vous l'avez oublié, ce qui n'est pas bien du tout, je vous le représente, pour que vous révisiez.

Vous êtes au courant? Il était une fois un monsieur qui s'appelait Bayrou et qui avait fini par se trouver sur un plateau de télévision, en compagnie de la Mère Polony, du Père Caron et du Père Ruquier, parce qu'il venait d'écrire un livre. Bien fait pour lui! Il n'avait qu'à pas l'écrire, ce livre! D'autant plus que, dans ce livre, il était beaucoup question de vérité, puisque le Bayrou l'avait écrit pour expliquer qu'il faut dire la vérité aux Français. Alors ça, c'est un scoop! Imaginez un peu qu'il ait écrit qu'il faut mentir aux Français.

Vous vous en doutez, les deux larrons et la noble dame cités plus haut n'arrêtèrent pas de le contredire, parce que, affirmaient-ils tantôt d'une manière, tantôt d'une autre, la vérité de Bayrou est la vérité de Bayrou, et leur vérité, à eux, et celle des autres, n'est pas la même vérité. Le Père Bayrou eut beau répéter fort courtoisement qu'on lui présentait des opinions, pour des vérités, rien n'y fit. Quand j'aurai conclu que chacun resta sur ses positions, j'aurai correctement rendu compte, en gros et en substance, de ce moment de télévision qui n'a absolument rien changé au monde, mais grâce auquel il y en a qui ont été grassement payés.

"A chacun sa vérité" Je ne voudrais pas avoir l'air de donner raison à Bayrou sur ce point, ni sur un autre, mais quand j'entends ça, je me demande toujours si celui qui nous l'a servi pour la première fois ne disait pas exactement la même chose que Coluche quand ce dernier déclarait: "Il paraît qu'on est cernés par les cons. C'est vrai, mais on se rend pas compte à quel point." En effet, si ce que je dis ne correspond pas à la réalité, je suis bien en train de mentir. Non? Non, pas forcément, me répondrez-vous, car si je crois ce que je dis alors que ça ne correspond pas à la réalité, je ne mens pas. Et là, ébloui, je vous féliciterai d'être aussi intelligent. Mais, dîtes-moi, si je crois ce que je dis, alors que ça ne correspond pas à la réalité, je ne mens pas, certes, mais je suis bien un bon à rien qui parle de ce qu'il ne connaît pas, un ignorant qui croit tout savoir, c'est à dire un crétin, un incapable, dont l'incompétence est tout aussi criminelle que la malhonnêteté du pourri qui ment, parce que, quand cela risque d'engager la vie de millions d'individus, les conséquences sont exactement les mêmes. Non?

Chacun a bien le droit de penser ce qu'il veut, rétorquerez-vous. Bien sûr, mais si ce que je pense ne correspond pas à la réalité, je ferais sans doute mieux de commencer par étudier ce qu'elle est, cette réalité, en me gardant bien d'en penser quoi que ce soit, aussi longtemps que je ne la connais pas. Et, s'il vous plait, rien que pour me faire plaisir, repondez à la question suivante: Est-il vrai que moins on pense quoi que ce soit, de quoi que ce soit, moins on pense de bêtises, ou est-ce que, au contraire, moins on pense quoi que ce soit, de quoi que ce soit, plus on pense de bêtises?  

En attendant que vous ayez trouvé la réponse, je vais une fois de plus rendre hommage à un des personnages cités plus haut, en me demandant si, par hasard, Coluche n'avait pas raison quand il disait: "Il paraît qu'on est cernés par les cons. C'est vrai, mais on se rend pas compte à quel point."

Régis Ducon Lajoie la Marée Monte