Obono et moi: le monde à l'envers

Vous êtes au courant? Quelle affaire! Vous en avez certainement entendu parler. Et vous l'aurez compris, je suis en train de faire allusion à ces images de madame Obono publiées par un journal. Images certainement choquantes, puisque tout le monde, ou presque, à l'air choqué par ces images. En même temps, quand j'ai entendu parler de cette histoire, je ne voyais pas du tout qui était cette dame. A tel point qu'il m'a fallu réfléchir longtemps pour me souvenir que j'avais en effet vaguement entendu parler d'elle deux ou trois fois. Maintenant, par contre, grâce à cette affaire, je saurai désormais qui elle est. Quelle PUB ça lui fait! Si bien que je me demande si elle n'a pas payé les gens de ce journal pour qu'ils publient ces images, afin que ça lui fasse cette publicité. Si ce n'est pas le cas, j'espère qu'elle aura au moins l'élégance de leur donner quelque chose. Si jamais elle ne le fait pas, c'est une ingrate!

Encore une fois, si tout le monde, ou presque, semble choqué par ces images que tout le monde, ou persque, trouve insultantes, c'est sans doute qu'elles sont tout autant choquantes qu'insultantes parce que, si j'ai bien compris, la publication de ces images est une manière de traiter cette dame d'esclave, et puisque madame Obono a porté plainte, je laisse à la justice le soin de faire son travail. Cependant, si je devais insulter quelqu'un, je ne traiterais pas ce quelqu'un d'esclave, mais d'esclavagiste. Pour insulter quelqu'un, je ne le traiterais pas de volé, mais de voleur; je ne le traiterais pas de torturé, mais de tortionnaire; je ne le traiterais pas de supplicier, mais de bourreau. Et vous pouvez bien me traiter d'esclave autant que vous voudrez, vous n'arriverez pas à m'offencer, bien au contraire, car ce n'est pas une honte d'être un esclave, c'est une honte d'être un esclavagiste!

D'ailleurs, né d'un père étranger et d'une mère française, je n'ai pas d'ancêtres esclaves, mais peu s'en faut, puisque mes humbles origines paysanes du dôté français indiquent qu'ils étaient probablement des serfs, des manants, des vilains, comme Jacquou le Croquant, qui ont vécu comme lui et les siens dans un dénuement total. Ils n'avaient pas le statut d'esclaves, certes, mais ils pliaient quand même sous le joux de maîtres impitoyables et méprisants, jusqu'à en mourir de misère et d'épuisement. C'est pourquoi ils finissaient par se rebeller, de temps en temps, quand il n'en pouvaient plus de supporter l'insupportable. Et non seulement je n'ai pas honte d'être un serf, un manan, un plébéien, un vilain, mais je suis content d'être du côté des victimes, plutôt que du côté des bourreaux. Soit exactement le contraire de ce que semble éprouver madame Obono, et tous ceux qui sont tellement choqués qu'on l'ait présentée comme une esclave. Chacun tire sa gloire d'où il peut!

Aurait-elle préféré être présentée en esclavagistes? Et tous les choqués par ces images choquantes auraient-ils préféré, eux aussi, qu'elle le fût, présentée en esclavagistes?

Quant à ce journaliste qui, sur LCI, tard dans la soirée, prétendit que n'importe quel historien démonterait facilement les affirmations selon lesquelles des noirs vendaient des esclaves noirs à des esclavagistes blancs, il ferait mieux de se renseigner avant de parler, ou il pourrait passer soit pour un crétin qui parle sans savoir, ou pour un gros pourris de menteur, car, contrairement à ce qu'il prétendit ce soir-là, aucun historien ne peut honnêtement nier qu'il y avait en effet des africains qui organisaient de grandes chasses au cours desquelles ils dévastaient des villages entiers, tuant, massacrant sans pitié tout ce qui résistait, y compris femmes, enfants, vieillards, de manière à capturer les survivants qu'ils vendaient aux esclavagistes blancs.

Cela n'enlève rien à la cruauté et aux crimes des esclavagistes blancs, mais si nous voulonns lutter contre le racisme, les crimes des blancs ne doivent pas faire oublier les crimes des noirs.   

Je me demande si, par hasard, Coluche n'avait pas raison quand il disait: "Il paraît qu'on est cernés par les cons. C'est vrai, mais on se rend pas compte à quel point."

Régis Ducon la Marée Monte

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Bise